Ecrire un bon roman : 10 erreurs faciles à corriger
Tu as mis un point final à ton roman, ou ton texte, ta nouvelle, tu l’as lu et relu, corrigé et recorrigé. Pourtant tu te demandes : où est la faille ? Tu as un doute. Tu sens que ton roman pourrait être meilleur. Ta structure narrative semble tenir la route, tes personnages ont une psychologie en béton, ton suspense est impeccable, ton climax réussi. Alors ?
Qu’est-ce qui ne colle pas ? Ce goût qui t’envahit de… comment dire ? Tu l’as sur le bout de la langue… Oui : ce goût d’inachevé ! Comment l’expliques-tu ? C’est bien le problème : tu ne sais pas. J’ai vécu ça aussi, nous l’avons tous vécu, nous qui écrivons.
Pas de panique. Je te montre en 10 points ce que tu dois vérifier en urgence. Il se peut que tu aies simplement oublié un ou des détails qui participent de manière importante au grand tout qu’est ton roman, ta nouvelle, ton conte. Il suffit d’un rien pour dénaturer l’ensemble, le rendre moins crédible. Or la grande affaire d’une histoire, d’un roman, c’est de rendre crédible l’incroyable. Il ne faut jamais perdre de vue cela. Il faut donc faire attention à chaque détail.
Vérifie :
1. Tes noms et prénoms de personnages
John dans les années 50 aux États-Unis paraît naturel. John, français vivant en France dans les années 50, et bien… A moins que son père soit un GI jamais rentré au pays ? Là, ça devient crédible.
Ça n’a l’air de rien mais un nom et prénom mal choisis peuvent donner à ton livre une allure boiteuse. Ton lecteur n’analysera pas forcément pourquoi mais il ressentira un vague malaise : quelque chose n’est pas à sa place. Il n’y croira pas, il ne se laissera pas prendre par l’histoire.
2. Le milieu social
Notre monde est social. L’homme est un animal social. Dans n’importe quel pays, civilisation, même dans la tribu la plus perdue aux confins de l’Amazonie, tout clan est social. Chaque lieu est attaché à des us et coutumes, des manières d’être, de faire, penser, sentir, des croyances particulières.
Ton personnage n’agit pas de la même façon s’il se bat pour sa survie dans un bidonville au Guatemala que s’il prend du bon temps dans un manoir irlandais. C’est une réflexion très basique mais je suis un peu fatiguée des personnages dont le milieu social et les manières ne sont pas corrélées. On en trouve trop souvent dans les romans. Ce qui fait que le lecteur n’y croit pas.
Je garde toujours en tête un roman extraordinaire qui traverse de multiples milieux sociaux en les décrivant de manière exemplaire. Il m’a émerveillée en grande partie par cela. Il raconte l’ascension sociale vertigineuse d’une femme et sa chute. Je ne peux que t’enjoindre à lire un jour ce pavé de trois tomes à l’écriture magistrale : La sans-pareille, L’archange de Vienne, L’enfant aux loups. Françoise Chandernagor y est d’une justesse parfaite. Une longue et intéressante interview d’elle ici. Et plus courte mais pertinente ici.
3. L’orthographe
Je te renvoie aux Bescherelle, aux logiciels de correction, aux amis qui veulent bien épouiller ton texte pour y cueillir les dernières coquilles… Ne laisse rien passer. Ça fait désordre un romancier qui fait des fautes. Si tu as vraiment trop de lacunes, prends un correcteur de métier. C’est un sacrifice qui en vaut la peine, surtout si tu t’autoédites. Je pense même que là, c’est indispensable.
4. La conjugaison
La concordance des temps surtout… Je lis parfois de drôles de choses. Je ne suis pas certaine que moi-même, parfois… La langue française est très complexe et l’on a beau écrire depuis longtemps… Vérifie-toi encore.
5. La typographie
Les conventions typographiques sont strictes. Elles ont étés conçues au fil du temps surtout par les imprimeurs pour faciliter la lecture. Aucune fantaisie ! Quelquefois, elles frôlent l’aridité. Elles ne t’arrangent pas toujours, toi, l’écrivain ! Mais il faut t’y plier pour faciliter la lecture de ton roman à tes lecteurs car ils y sont habitués depuis toujours, comme nous tous. Si tu fais une entorse, il faut qu’elle soit voulue, utile, immédiatement compréhensible, et apporte un plus significatif. C’est surtout en poésie que tu peux te permettre quelques écarts.
Si tu n’as pas la moindre idée du casse-tête que représentent les règles typographiques, jette un œil, et même les deux, ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Wikip%C3%A9dia:Conventions_typographiques
6. Ton genre littéraire
Ton genre littéraire est-t-il bien défini ? Et s’il est hybride, voire expérimental, paraît-il volontaire ou conçu par hasard et maladresse ? Polar ou thriller ? Romance ou drame ? Heroic fantasy ou science-fiction ? Ou les deux volontairement ? Ou trois genres qui se mêlent ? Attention, le mélange des genres est le plus délicat à manier. Tu peux mêler tout ce que tu veux pourvu que ton lecteur comprenne tout de suite et sache toujours où il en est.
7. Les répétitions
C’est étonnant ce que je lis parfois ! Les répétitions sont pourtant très simple à corriger. Il faut un peu d’attention, c’est tout.
En revanche, tu as le droit de jouer sur la répétition. C’est un art, un procédé formidable quand il est bien utilisé. Il peut apporter beaucoup de force à un texte en donnant de l’insistance, de la présence à un mot, quelques mots ou une expression.
8. Tes tics de langage
Je ne parle pas des tics de langage que tu as peut-être placé, volontairement, dans la bouche de certains de tes personnages pour les rendre plus insolites, caricaturaux ou simplement caractéristiques. Il est rare qu’un écrivain s’en serve mais pourquoi pas ? Cela peut être intéressant.
Je parle de tes tics de langage, pardi ! Il faut les ôter s’ils sont récurrents, n’apportent rien ou affaiblissent systématiquement ce que tu exprimes. Tu me suis : il faut traquer tes tics. Prends du recul sur ce que tu écris pour les voir. SI tu n’as aucun tic de langage à corriger, que ta langue est sans défaut, tu es béni des dieux !
9. Le participe présent
Traque-le parce qu’il n’existe rien de mieux qu’un participe présent mal placé pour alourdir et tuer une phrase. Si tu as un doute, lis ta phrase à voix haute. Le participe présent doit se rapporter à un nom ou un pronom. Or je lis de plus en plus de phrases ahurissantes où le participe présent ne se rapporte à… rien. Je ne suis pas du tout contre le participe présent car il est réellement utile. Mais utilise-le à bon escient.
Par exemple : En ouvrant mes volets ce matin-là, un grand bonheur m’envahit. (Jean d’Ormesson) C’est correct.
Par contre, ceci ne l’est pas : Joseph est le seul homme à avoir mangé des pommes, permettant d’alléger le panier. Pourtant je lis ce genre de construction absurde partout. Ce n’est pas Joseph qui a permis d’alléger le panier. C’est son action : il a mangé les pommes. Donc il faut écrire : Joseph est le seul homme à avoir mangé des pommes ; il a permis d’alléger le panier. Ou encore : Joseph est le seul à avoir mangé des pommes, ce qui a permis d’alléger le panier. C’est autrement plus clair et élégant.
10. Les formes passives
C’est pareil, j’en vois de plus en plus, à toutes les sauces. La forme passive ôte énormément de vie et d’élan à la phrase dans notre langue. Elle coupe l’action et affaiblit l’attention du lecteur, embourbe le roman dans la mollesse. Il faut que le lecteur se sente avancer de concert avec les personnages et l’intrigue.
Exemple : Elle se fit poser par un coiffeur des bigoudis dans les cheveux. (Oui, je sais, c’est superbement littéraire ! C’est pour que tu t’en souviennes !)
Je préfère : Un coiffeur lui posa des bigoudis dans les cheveux. C’est plus direct, plus franc.
Ce tour d’horizon de 10 erreurs faciles à éviter est achevé. Je pense que cette liste te sera utile, particulièrement si tu débutes. Maintenant rien ne sert de lire cette liste si tu ne te mets pas au travail. Je t’invite donc à prendre ton roman et à le corriger encore une fois. Je te conseille aussi de lire mon article sur les 4 trucs infaillibles pour rendre un roman crédible.
Tu peux tout corriger en même temps si tu es déjà entrainé à cela. Mais si tu débutes, je te conseille de regrouper au maximum trois recherches d’erreurs d’un type différent sur une lecture. Puis de recommencer avec d’autres types d’erreurs. Ainsi, ton filtre sera plus réduit donc plus efficace.
N’hésite pas à me laisser tes commentaires sous l’article et, s’il t’a plu, à le partager sur les réseaux ou à un ami.
A bientôt,
Laure.
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Bonsoir,
Je suis impatient d’apprendre et de découvrir le savoir de celles et ceux qui ont passé ce stade de l’apprentissage.
A se relire.
Heureuse de voir ton enthousiasme et ta motivation. Plein d’autres choses à apprendre et découvrir à venir sur le blog puisque je publie environ un article par semaine. Et dans les articles précédents, tu peux déjà trouver pas mal de techniques. A bientôt.
Bonsoir,
C’est à nouveau le « re-loup »….Merci pour ce guide qui me donne de solides bases à mes incompétences (les afficionados de Jules FERRY ont très tôt supprimé le radiateur devant lequel je me dissimulais!).
Auto fictionnel.. le Loup a mis les pattes dedans!je viens de me rendre compte que je devenais donneur de leçons de vie!
Pourtant je n’invente rien je me considère comme un témoin de mes vies passées.
Auriez-vous l’amabilité de jeter un œil bienveillant sur mon blog ?
A nous relire.
Oui, je vais aller sur votre blog jeter un œil curieux et intéressé, et je vous laisserai un commentaire. Je n’ai rien contre l’autofiction, je la pratique aussi dans mes romans, car qui connaît-on mieux que soi-même ? Le tout est de ne pas la rendre indigeste et de ne pas susciter de voyeurisme chez le lecteur. C’est délicat à faire et donc intéressant.
Je suis contente que le guide vous ai donné des bases, c’est important d’en avoir. Pour le radiateur abandonné, ce n’est pas grave car on ne donne rien de tout cela dans les lieux d’enseignement, pas même durant les études littéraires (après tout, les gens qui rédigent les programmes ne sont pas écrivains, donc…)
Au plaisir de vous lire sur votre blog,
et à bientôt.
Il faudrait distinguer « écrivain » et « écrivANT »…
Ne suis qu »écrivant…
Bonjour Lézards red,
Il y a de bons « écrivants » et de bons écrivains. De mauvais « écrivants » et de mauvais écrivains. Des « écrivants » et des écrivains, bons ou mauvais, qui peinent à se corriger. Qu’importe que nous soyons professionnels ou pas. Pourvu que nous n’écrivions pas en vain, c’est-à-dire sans nous faire comprendre. Mes conseils sont valables pour les uns et les autres.
« Ne pas écrire en vain ».
Il est salutaire de se poser les questions « qui suis-je , pourquoi je m’exprime et pour qui et à qui sont destinés ces lignes « La seule réponse qui me vienne à l’esprit se trouve dans la rédaction même de nos écrits…Écrivain, Écrivant entrain d’écrire? égoïstement j’écris pour moi avec des dégâts collatéraux..(.en espérant que cela plaise aux autres ) je manque d’imagination alors je suis devenu témoin de ce que j’ai vécu.Serais-je un écrivain? on ne se déclare pas « chef » ce sont les autres qui vous élisent….Ce qui devrait nous permettre de redescendre sur terre avec la tête froide !
Loupzen,
Oui, il faut garder la tête froide ce qui n’est pas toujours facile. Surtout quand on a la tête prêt du bonnet comme moi !
Je ne suis pas certaine que les autres élisent toujours les bons chefs… Parfois, il faut savoir se lever et s’élire le premier, et les autres suivent ! Par exemple, La conjuration des imbéciles, un livre fantastique de John Kennedy Toole n’a pas trouvé preneur chez les éditeurs. Tant et si bien que son auteur, désespéré, s’est suicidé à 31 ans. Il considérait son livre comme un chef-d’oeuvre et s’en est un. C’est sa mère qui a réussi à le faire éditer après sa mort. S’il avait persévéré, s’il s’était élu lui-même, il n’aurait rien lâché et il aurait sans doute écrit d’autres bijoux.
Après ça, il y a aussi des tas d’imbéciles qui écrivent n’importe quoi avec beaucoup de bonne volonté et là, on a des écrits vains. Et là, tu as parfaitement raison. Et il est vrai qu’on écrit pour soi avant d’écrire pour les autres.
Merci pour ces conseils.
Je t’avoue qu’en les lisant j’en ai eu des sueurs froides. Car je me suis dit » ça y est il faut que je corrige tout ce que j’ai écrit »
J’essaie d’écrire comme je suis, spontanée, avec humour et sans me prendre de haut. Alors si je dois me mettre dans le moule de l’écriture parfaite, je sens que je vais me perdre.
Je prends note de vos conseils. Je sais que c’est pour nous aider. Alors je vais relire tout ça avec un oeil avertit.
Ladybird,
Pas de panique, c’est juste de la relecture et corrections. No stress, on respire, ça fait prendre de la hauteur sans se prendre de haut (enfin, tu vois ce que je veux dire !)
L’écriture parfaite, on oublie, c’est trop frustrant. Faire le mieux de ce qu’on peut faire au moment où on le fait, je crois que c’est à la portée de tout le monde. Voilà, dit comme ça, je pense que ça fait baisser la pression.
C’est vrai que je mets toujours la barre haut, c’est dans ma nature, dès fois il faut me freiner…
Bonne relecture.
Voilà 10 conseils parfaitement exprimés et qu’il faut suivre mais… tout le monde ne peut pas écrire, il faut avoir en soi une validité qui ne s’apprend pas.
Je me permets d’en ajouter un 11eme parce que nous le rencontrons souvent dans les manuscrits que nous recevons : c’est le CV. L’auteur nous inflige une fiche digne des RG pour présenter son héros quand le lecteur devrait le découvrir au fil de sa lecture.
Merci Laure pour ces conseils généreux.
A Chum éditions,
C’est vrai, tout le monde n’a pas la capacité d’écrire. J’écris mes articles en supposant qu’ils seront lus par les gens concernés. Après…
Merci pour ce 11eme point. Ah, ah, le fameux CV ! C’est un exercice délicat pour l’écrivain. Séduire le lecteur de la maison d’édition pour lui donner envie de lire le manuscrit, en dire ni trop peu ni pas assez. Ce serait un bon sujet d’article ! Je ne suis certaine d’être moi-même très douée pour présenter mes héros.
Je suis touchée qu’une maison d’éditions s’intéresse à ce blog ! C’est une jolie surprise.
Je suis allée voir du côté de chez vous. Je vous souhaite de continuer très longtemps dans ce monde difficile de l’édition. J’ai vu que vous ne preniez que des tapuscrits, et c’est d’un bon sens rare dans l’édition -où l’on continue à nous demander du papier, du papier, du papier…
Merci de votre intérêt.
Il y a une méprise, je me suis sans doute mal exprimé. Je ne parlais pas du petit résumé très souvent mal ficelé mais du héros dans le roman lui-même. Il est présenté d’un bloc avec son passé, son métier, ses particularités qui ne permettent plus au lecteur de le découvrir pas à pas.
Je suis un nano éditeur très attaché à la qualité de l’écriture et si vous m’y autoriser je mettrai un lien vers vos articles. Je n’ai pas encore tout lu, mais je le ferai
Bien à vous
si vous m’y autorisez avec un « z », bien sûr. Désolé pour ce manque de relecture.
Si vous saviez toutes les coquilles que je laisse passer, hélas, quand j’écris, et que je ne vois qu’après… Après tout, davantage on écrit, davantage on risque d’en oublier. Nous sommes pardonnables. Ceux qui ne font rien ne se trompent jamais.
A Chum éditions,
Comment amener les personnages sans tout balancer d’un coup, oui, ça aussi ce n’est pas évident, il faut croire. Car on voit en effet des lourdeurs qui nuisent à la découverte du héros. Il faut distiller ce qu’on sait de lui (mais pas tout forcément) tout le long du roman, et c’est subtil. Doser, toujours doser. Comme en cuisine ! Avec des arrière-goûts, c’est infiniment mieux.
Exact : auspices, masculin pluriel. Encore une particularité.
Je serais très heureuse que vous mettiez un lien vers mes articles. C’est sympathique à vous de partager. Je vous en remercie.
A bientôt,
Laure
Peut-être corriger : il a permit d’alléger le panier. « Permis » serait plus acceptable !! 🙂 Merci pour tous ces bons tuyaux !
Merci Sylvette, décidément, j’en laisse encore passer ! Je corrige tout de suite.